ET GUILLAUME APOLLINAIRE
Le calligramme est un poème graphique : un poème dont les vers sont disposés sur la page de manière à former un dessin. À l’époque de la Grèce antique, Simmias de Rhodes écrit des poèmes dits « figurés », dont la disposition sur la page illustre une hache, un œuf et les ailes de l’amour. Mais le mot calligramme lui-même, qui signifie « belles lettres », est l’invention d’un poète français, Guillaume Apollinaire. Son recueil Calligrammes, publié en 1918, continue d’inspirer les professeurs d’art plastique du monde entier.
L’idée d’un calligramme est simple, du moins en apparence, car entre le contenu du poème et sa forme sur la page, le rapport n’est pas toujours évident. Le poème Il pleut, par exemple, composé de traits verticaux qui se lisent de haut en bas, évoque moins une pluie réelle que les pensées, les souvenirs qui tombent à l’intérieur de soi. En forme de soleil, le poème Jeunes filles à Chapultebec est une explosion qui brise les phrases et nous invite à les recomposer. Ainsi, chacun des poèmes présente un nouveau jeu, une nouvelle relation possible entre le sens des mots et leur dessin. La lecture, qui se fait habituellement à l’horizontale, de gauche à droite, est déstabilisée. Les surréalistes, dont Apollinaire est l’un des maîtres, croient que le dérèglement de l’art, sous toutes ses formes, peut ébranler notre esprit un peu engourdi et provoquer une libération intérieure. Il suffit d’entrer dans le jeu.
Guillaume Apollinaire, Calligrammes , 1918